Parque de la Memoria, Buenos Aires, Argentine
Face à la mer, derrière l’université de Buenos Aires, on découvre le Parque de la Memoria, parc de sculptures monumentales d’artistes de renommée internationale tel Denis Oppenheim, León Ferrari ou William Tucker, dédié aux trente mille « desaparecidos ».
Dès 10h du matin, heure d’ouverture, c’est sous un soleil de plomb que l’on se promène dans cet espace où les arbres sont presque absents. On est d’emblée surpris par l’émotion qui s’en dégage.
Neuf sculptures, toutes imposantes, sobres et puissantes. Sept sont d’artistes argentins. Toutes font référence à l’effacement, la disparition.
Sur chaque cartel qui accompagne les œuvres, toutes poignantes : l’intention de l’artiste. Comme celle de Nicolás Guagnini, artiste argentin né en 1966, intitulée 30.000. Sur vingt-cinq poteaux en prisme de quatre mètres de haut, espacés les uns des autres de façon régulière, est imprimé le portrait du père de l’artiste, disparu en 1977. En se déplaçant autour de l’œuvre, on arrive à l’angle précis où ce portrait est entièrement reconstitué. Il se décompose et s’efface lorsqu’on se déplace à nouveau.
Ou encore celle de Claudia Fontes, artiste argentine née en 1964, Reconstrucción del retrato de Pablo Míguez. À 40 m du bord, installé dans le Rio de la Plata, en mémoire aux disparus jetés dans ce fleuve, se trouve un petit personnage en acier inox que l’eau, en s’y reflétant, fait disparaître. Pablo Míguez, disparu à l’âge de 14 ans, aurait aujourd’hui le même âge que l’artiste.
Le Parque de la Memoria, conçu en 1998 par des organismes humanitaires, les pouvoirs institutionnels de la ville de Buenos Aires et l’université, est un lieu de souvenir, de réflexion, en hommage aux victimes du « terrorisme d’état » dans les années 70 à 80. Il est inauguré en 2006.
Il abrite également un musée ainsi qu’un imposant Mémorial aux Disparus. Œuvre d’art en lui même, ce long mur en granit noir ou gris selon la lumière zigzague à la fois vers le ciel et la mer, inscrivant dans ce paysage épuré comme une grande cicatrice. Sur ce granit, classés par année et par ordre alphabétique, sont gravés les noms des trente mille disparus et leurs âges : de 14 à plus de 80 ans, la majorité entre vingt et trente ans. Selon l’angle et le jeu d’ombre et de lumière, les noms disparaissent ou réapparaissent.
De l’architecture au choix imposant des œuvres, c’est avec force, élégance et subtilité que se parc témoigne d’une page douloureuse de l’Histoire.
Artistes : Dennis Oppenheim, William Tucker, Roberto Aizenberg, Marie Orensanz, Grupo de Arte Callejero, Nicolás Guagnini, Claudia Fontes, Norberto Gómez, León Ferrari
Parque de la Memoria
Avenida Costanera Norte Rafael Obligado 6745
Derrière la cité Universitaire
Buenos Aires, Argentine
Ouvert du lundi au vendredi : 10h-18h
Samedi, dimanche et jours fériés : 10h-19h